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Farnèse Louis Charles - Biographie

 

Dans une de ses notes autobiographiques envoyées le 26 mai 1983 à l’Archevêque de Port-au-Prince (Mgr François Wolff Ligondé) sur l’esprit du fondateur (au moment où il fallait revoir les Constitutions des Petits Frères), le père Farnèse Louis-Charles se présente ainsi :

UN PEU D’HISTOIRE

Je suis par vocation homme de la terre, de la belle nature du Bon Dieu. Très tôt, certes, je montrais autant d’aptitude pour les études que d’amour de l’agriculture. Je préparais ma terre avec les moignons d’outils repérés, clôturais mon champ, plantais, irriguais, construisait mon poulailler, élevais la pintade, la dinde, etc. Si bien que j’ai failli perdre un doigt en me servant d’un outil (j’en porte encore la marque) si bien que, par ailleurs, le directeur de mon école a cru devoir s’opposer à mes activités agricoles et rurales, arguant que je n’en avais pas besoin pour vivre: heureusement mes parents ne l’ont pas écouté.

Devenu jeune homme, je rêvais tout le temps aux moyens d’irriguer les terres du pays rendues improductives à cause des sécheresses sporadiques de nos régions (assurément, c’est triste et regrettable cette situation).

Devenu prêtre, j’étais parmi les premiers patriotes à dénoncer avec ardeur le péril national de l’érosion, par la parole et par la plume, et j’ai fini par convaincre parfaitement qu’il est impossible de sauver Haïti sans lui avoir sauvé "sa paysannerie", en tout premier lieu, bien entendu, celle de nos montagnes, qui est par vocation, la gardienne de la nature chez nous.

Vers 1937, à une fête du drapeau à l’Arcahaie, le vicaire que j’étais alors, profite de la presence du Président Sténio Vincent pour en parler en chaire. Celui-ci (d’ailleurs mon cousin), a fait paraître bientôt une loi “interdisant le feu sur tout le territoire de la République”. J’ai découvert plus tard qu’il a eu toute une vaste propriété plantée en cocotiers: c’est celle de l’actuel sanatorium de Sigueneau, Léogâne. Du reste, il faisait planter des arbres au long des routes publiques, il me semble (acajou, amandiers, etc.).

Nommé curé de Marbial, j’ai eu dans cette paroisse une chaine d’une cinquantaine de coopératives, ayant pour tâche notamment de combattre l’érosion et de régénérer le sol. La Loterie Nationale allouait $200 par mois : ils servaient à encourager ces coopératives, de même que nos modestes écoles au nombre de soixante environ – il y en avait en principe une petite à chaque centre catéchétique, dit station. Survint l’UNESCO (et son fameux « Projet Pilote » de Marbial), attirée justement par le « dynamisme de cette population ».

Au commencement, à un moment donné, on avait l’espoir que tout irait bien, grâce à un représentant de la grande Organisation, un mexicain, je crois, disposé à collaborer avec le curé. Mais reparti en toute hâte – je n’ai jamais su pourquoi – les choses ont pris alors toute une autre tournure. Avec ces gens qui affichaient leur neutralité, leur indifférence religieuse, c’était pour la religion Catholique au minimum… la réalisation de la parole de Notre Seigneur « Qui n’est pas avec moi est contre moi, et quiconque ne ramasse pas avec moi disperse ». En tout cas, j’ai dû lutter fort pour ne pas assister à l’anéantissement de notre école presbytérale du centre paroissial au profit d’une autre, nationale, mais dite de l’UNESCO, établie non loin de la nôtre sur la propriété d’un temple protestant.

Bref, mes inquiétudes aboutissaient à la pensée de donner à l’Église « l’UNESCO du Bon Dieu », en l’espèce, une famille religieuse paysanne. En effet, l’UNESCO formait des leaders paysans polyvalents. C’était des gens simples des deux sexes. Pourquoi ces leaders ne seraient-ils pas, en partie, des consacrés à Dieu, ne donnant pas seulement la terre mais aussi le ciel ? Madame la Présidente Lucienne Estimé, contactée, accordait une subvention mensuelle de $50. Cependant l’œuvre fini peu à peu par absorber aussi les $200 de la Loterie Nationale : une congrégation n’est-elle pas la coopérative la plus perfectionnée du monde, et, en plus, une semeuse d’écoles en nombre illimité, si elle s’y met ?

 

CONGRÉGATIONS POUR ME MULTIPLIER

Je me mettais en tête que notre famille religieuse donnerait à l’Église et à l’humanité d’autres moi-même de plus en plus nombreux ; car je ne pouvais pas me figurer qu’on puisse être religieux dans la congrégation fondée par quelqu’un sans vouloir sincèrement être son disciple. Je suis parfaitement convaincu jusqu’à présent que cela est l’enseignement réel de l’Église, assistée de l’Esprit-Saint. Je viens d’apprendre en effet que Rome entend que les religieux(ses) aient un mains non seulement leur livre de vie et leurs constitutions, mais encore les écrits de leurs fondateurs…

À ce propos, je m’entends dire parfois : « S’il y avait beaucoup d’haïtiens comme vous, Haïti serait sauvée ». En ma présence, le Président Élie Lescot a déclaré en substance, en plein conseil de Secrétaires d’État : « C’est quand il y aura deux cent prêtres comme celui-là qu’Haïti prendra son essor ». Alors, ne serait-il pas satanique de s’arranger à être mien seulement de nom, prétendant n’avoir à suivre que les constitutions (retouchées et supposées conformes à mes idées).

 

UN PEU D’AUTOBIOGRAPHIE PLUS SPÉCIALE

Mais, en plus de ce que j’ai dit déjà, le pauvre instrument du ciel que je crois être, ajoute qu’il est celui :

[-A-]

- qui tient à faire aimer la religion par les masses populaires. Hélas ! l’on constate que dans les régions où les religieux(ses) se dévouent le plus, c’set justement là que les consacrés à Dieu et, partout, la Sainte Église, ne jouissent pas du tout de la sympathie des gens, sont plutôt très détestés ;
- et qui considère d’autre part avec beaucoup de tristesse que nombre de besogne absolument indispensables provoquent le dégoût de la population haïtienne en général , parce qu’elles ont été avilies par l’odieux régime d’esclavage d’antan, dont particulièrement le travail des champs : ne faut-il pas les réhabiliter, les faire aimer ?

Or voici les causes de ce double état de choses :
1) On ne s’identifie pas assez avec la population ;
2) Le nombre de familles (en Haïti surtout) font des sacrifices trop durs pour élever leurs enfants et pour contribuer au salaire des enseignants.

Que voulez-vous ? Ce qu’on gagne ne suffit même pas pour assurer le pain quotidien. Résultat : quand parents et élèves finissent par se rendre compte que tous ces sacrifices ne soulagent pas leur misère, ils se mettent instinctivement à détester maîtres et maîtresses qui, pensent-ils ne leur ont rien apporté de bon dans leur pénible existence. Et ainsi tout le bien qui a été fait est vite oublié…

Conclusions : 1) Pour se faire aimer et non détester et, en même temps réhabiliter les besognes pourtant indispensables avilies par l’ancien régime d’esclavage, prière d’exécuter notre plan de toujours qui consiste à s’abaisser (religieux et religieuses) jusqu’à cultiver la terre à côté de ses élèves (garçons et filles), de même, à faire la lessive, la cuisine, à côté du personnel de la maison, si réellement on ne peut pas s’en passer ; 2) s’appliquer à l’« Éducation rentable ». Celle-ci faisant gagner de l’argent en même temps qu’on étudie, est le seul remède, il me semble au mal signalé plus haut (no. 2), remède très efficace et mille fois béni experientia teste. Je suis même d’avis que les nôtres n’aient que ce rôle à remplir dans les écoles dirigées par les autres (écoles religieuses, nationales ou autres), dès que cela sera possible.

[-B-]

- qui a toujours compris que l’accent, en Haïti, doit être mis sur l’esprit pratique et non sur la rhétorique, cette dernière n’étant guère la vocation fondamentale de l’homme haïtien : nous sommes dans un pays agricole et maritime.

Conclusions : Nos congrégations à nous doivent être beaucoup plus travailleuses qu’enseignantes, et même, quand il y a lieu, cesser absolument d’être enseignantes pour être « travailleuses », comme nous l’avons dit plus haut…

Tenez au moment actuel, des paysans mourant de faim. Nos instituts établir dans les environnements concernés des maisons qui serviraient de ponts par lesquels passeraient les secours de tous pouvant leur venir de l’étranger, par exemple. Par surcroit, leur détresse n’a même pas de voix pour se faire entendre au dehors. N’est-ce pas aux nôtres de ces maisons, de leur servir de voix ?

D’ailleurs, qu’est-ce qu’on penserait d’une mère qui serait l’unique nourrice de son bébé et qui se mettrait en tête d’aller cultiver des champs pour nourrir ce dernier à l’avenir, au lieu de l’allaiter au moment présent, où il va mourir sans les soins amoureux et dévoués de sa mère ?

Prière donc aux nôtres qui tiennent à aller étudier au moment actuel en Haïti ou ailleurs pour le salut de la paysannerie, de se faire une raison sous ce rapport. Certes, chaque chose ici-bas a son temps, et il y a un temps pour chaque chose.

[-C-]

- qui connaît par expérience bien des possibilités du pays d’Haïti soupçonne l’existence de beaucoup d’autres, et, par contre, n’ignore pas la misère du peuple, un pauvre peuple de chômeurs. Donc, les nôtres auront une formation de producteurs, de personnes qui mettent la main à la pâte. Alors, leur esprit pratique, développé par ce moyen, leur permettra de faire de nombreuses trouvailles, des inventions, capables d’améliorer le sort des pauvres gens : leur charisme à eux, de par la volonté de Dieu et l’esprit de leur fondateur, est celui de les sauver (exemples : vins, liqueurs, craie, médicaments tirés des plantes du pays ayant des propriétés qui tiennent du miracle)… Notons ici que la formation à monter et à descendre les mornes grâce à l’emplacement des maisons qui ne doivent pas être de la plaine, a beaucoup d’importance pour nous autres…

[-D-]

- qui souffre beaucoup de cette situation terrible, cette vraie calamité, qu’est chez nous la manie de l’imitation étrangère. Le Docteur Price-Mars l’appelle « bovarisme ». Le Docteur Carlo Désinor a écrit à ce sujet : « Nombreux sont les haïtiens qui croient vraiment que l’évolution c’est être à jour, être à la queue de toutes les animaleries des sociétés avancées en crise ». Et moi, renchérissant, j’appelle parfois ce travers le « macaquisme ». « Quand la France tousse, Haïti a la coqueluche », dit le dicton populaire haïtien…

Conclusion : Il faut que cela change, sinon nous sommes perdus, puisque tout ce monde qui s’offre à notre imitation, est en pleine décadence morale et que c’est un fait qu’on est beaucoup plus incliné à imiter le mal que le bien. Monseigneur l’Archevêque a fait allusion une fois en chaire (à ma connaissance) à la civilisation occidentale décadente…

Oui, il faut que cela change. Et qui est-ce qui peut, ici, mieux que personne, donner le signal de la réaction qui s’impose, sinon les consacrés à Dieu indigènes, épaulés naturellement par les hommes de cœur des populations en cause elles-mêmes, européennes et américaines ?

[-E-]

- qui hait les préjugés. Les anciennes constitutions des nôtres portent « Ils (elles) n’ont pas de préjugés ». (Les préjugés font beaucoup de mal, certes). Exemple pour me faire comprendre : je connais des hommes qui n’ont pas beaucoup d’instruction, mais qui sont de très bons professeurs. Il y en a d’autres, beaucoup plus instruits, qui sont incapables d’avoir aucun succès en pédagogie. C’est que les premiers sont nés instituteurs… De même, on est nés prêtres, religieux(ses), chefs, médecins, etc. Malheur aux sociétés où la tyrannie du préjugé de l’instruction empêche de tenir compte de cette vérité.

Conclusion : Je désire que les nôtres sachent, dans la mesure du possible, éviter ce piège. Qu’il ne s’imaginent pas surtout que les analphabètes de nos montagnes sont pour autant des êtres inférieurs. Jean-Jacques Dessalines aussi était un analphabète. Que, pour l’amour du Bon Dieu, personne de chez nous ne rougisse d’être paysan ou paysanne !

[-F-]

- qui a toujours compris que l’haïtien… se doit d’être sérieux… d’avoir du caractère.

- par ailleurs, j’ai toujours voulu être, pour ainsi dire, un homme catholique. Ce mot, on le sait, veut dire universel. Le Bon Dieu, lui fait lever son soleil sur les bons et sur les méchants, n’aime pas la ségrégation. Je suis, de plus, l’homme du juste milieu. Je m’élève souvent contre ceux « qui filtrent le moucheron pour avaler le chameau ». (On veut éviter un mal et on tombe dans un pire : Oh ! on ne fait que cela, hélas !)

PRIÈRE aux nôtres de bien méditer sur toutes ces choses, s’ils veulent vraiment être mes imitateurs dans le Christ Jésus.

[-G-]

- qui est spécialement convaincu que l’Église entière repose sur le Pape. « Tu es Pierre et sur cette pierre, je bâtirai mon Église ». En effet, c’est Lui qui choisit les Évêques ; eux-mêmes chargés de choisir les prêtres qui à leur tour admettent les fidèles dans l’Église du Christ. Si donc le Pape est puissamment assisté du Saint-Esprit et universellement obéi, le choix des Évêques sera toujours heureux, celui des prêtres de même, l’admission des fidèles, également : il y aura dans l’Église des Augustins, des Athanase, des Rémi, des Charles Borromée… en grand nombre, et la terre sera sauvé !

Conclusion : Nos congrégations seront cent pour cent papales : elles auront pour tâche d’obtenir du ciel par la prière et le sacrifice que le Pape, les Évêques, les Prêtres, soient pleinement ce que le Bon Dieu veut qu’ils soient et ainsi Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus sera continuée, elle qui priait pour le Pape, les Évêques, les prêtres, l’Église, le monde entier.

[-H-]

- qui s’attache spécialement au principe d’unité. Pour moi, Dieu est le chef suprême, la Tête de tout le corps que constituent l’univers visible et invisible, et, partout, il y a une tête, un chef dans l’univers créé à son image. La tête éliminée, on est cadavre. D’où le quatrième commandement, concernant non seulement les pères et les mères, mais toutes les autres têtes ou chefs, dans l’Église ou dans l’État. D’où les autres interventions de la Bible : « Lève-toi devant les cheveux blancs et sois plein de respect pour les vieillards » (Lév 19,32). « Dieu, tu ne l’insulteras pas, et tu ne maudiras pas celui qui a une responsabilité dans ton peuple » (Ex 22,27). « Cui vectigal, vectigal, cui timor et honor, timor et honor » (Rm 13,7)… (voir aussi 1 Pierre 2,13ss).

Curieux : l’on parle tout le temps de concorde, de solidarité, en ces temps-ci, mais : sauf avec les chefs, paraît-il, les fondateurs de congrégations en tête de liste ! Oui, séparer ce que Dieu a uni : les jeunes d’avec les anciens, les enfants d’avec leurs parents, les époux entre eux, c’est ce qui se fait partout, comme si Dieu n’avait pas parlé.

Conclusion : Je tiens à ce que mes disciples sachent dire : non à cette aberration dangereuse en vogue dans la civilisation occidentale décadente, à partir de Luther surtout, lequel est beaucoup plus qu’on ne le pense, le père de cette décadence notoire et abominable.

[-I-]

- qui n’a jamais voulu faire de congrégations complètement actives : en témoignant dans les anciennes constitutions, les nombreux exercices de piété, l’obligation du silence quasi-perpétuel, etc.

L’idée d’une branche contemplative chez les nôtres n’a jamais cessé de me poursuivre ou, du moins, celle d’un temps de contemplation et d’un temps de vie active, pour ceux et celles qui le désirent. J’ai même demandé à des sœurs qui voulaient partir pour la vie contemplative de patienter et d’attendre à ce sujet, notre réalisation à nous.

Conclusion : Dès que possible, que les nôtres tiennent compte de tout cela. Qui croit de plus que c’est une erreur funeste à l’Église en ce temps surtout de développement des Peuples, que les analphabètes qui ont sérieusement la vocation religieuse soient exclus de la participation au genre de vie pour lequel ils étaient nés. Circonstances nouvelles : tout le monde veut le développement en ces temps-ci : les analphabètes peuvent réaliser beaucoup de choses en ce domaine. Le père Werenfried l’a compris ; d’où la fondation par lui en Afrique des sœurs de la Résurrection pour la jeunesse féminine non instruite. De notre côté à nous, c’est spécialement pour les sujets de ce genre que nos Instituts ont été fondés.

Conclusion : Expérience faite, je crois profondément à l’extrême importance de ce point. Qu’il soit donc entendu que l’esprit du fondateur sur ce point essentiel doit être observé, d’une façon ou d’une autre !

Memento spécial : Nos Instituts sont destinés à l’apostolat dans les montagnes (éloignées de préférence). Ce sont les circonstances haïtiennes qui s’opposent (comme toujours) à l’exécution d’un tel dessein, si indispensable pourtant. Là spécialement, la formation pratique se révèle d’emblée plus nécessaire que l’instruction telle qu’elle se donne couramment au moment actuel.

[-J-]

- qui comprend, par la grâce de Dieu, l’importance de la belle vertu de la pureté. Le modèle que j’avais sous les yeux autrefois lorsque le Bon Dieu me faisait fondateur, c’était l’admirable foyer de Louis Martin donnant à l’Église jusqu’à cinq vierges consacrées, dont la sainte petite Thérèse ayant pu se réjouir humblement dans son autobiographie de n’avoir jamais perdu la grâce de son baptême. Or, en Haïti, même le mot pureté est inconnu, dans les masses analphabètes du moins. Pourtant, sans cette vertu essentielle, pas de vraie vie chrétienne possible et, de ce fait, c’est le salut des patries et du monde qui est bel et bien bloqué.

Conclusion : Nos congrégations doivent avant tout contribuer à établir le règne intégral de la pureté en Haïti et sur la terre entière. Or qui veut la fin veut les moyens. Mais, assurément, ce n’est pas en agissant avec légèreté que pareille chose se réalise. Qu’on se rappelle bien que la plupart des autres hommes étaient profondément chrétiens autrefois, qu’ils ont sous ce rapport des traditions de retenues imprimées dans leur subsconscience : chez nous, c’est le contraire qui a lieu. Chez nous, ce sont les grandes personnes elles-mêmes qui, souvent poussent les jeunes à être malhonnêtes en cette matière.

Ce qui est particulièrement grave, c’est que même lorsqu’on arrive à tenir bon en ce domaine malgré certaines légèretés, ceux qui nous observent sont, de leur côté, convaincus que les choses n’en demeurent pas là. D’où grave scandale des faibles : Le péché se commet sur notre compte ; on cite même notre nom à l’appui de sa mauvaise conduite ou pour faire tomber les âmes mal affermies, alors que Dieu nous a faits apôtres du bien et non entraineurs vers l’Enfer…

J’ai appris que la clôture religieuse existe encore… en vérité même si elle était abandonnée partout, Haïti se devrait, pensons-nous de ne pas s’en passer de si tôt… Chez nous spécialement ; point de « communautarisation ». Gare aussi aux habillements à la mode du jour qui visent tendancieusement à exposer le corps plutôt qu’à le voiler sous des prétextes, certes, qui ne tiennent pas debout devant l’obligation générale d’être purs.

[-K-]

- qui croit que le rôle primordial du chrétien, et, à plus forte raison du consacré à Dieu, c’est de montrer dans sa conduite, ses actions ses entreprises, la sainteté de Dieu dont on est l’image en ce monde. N’est-ce pas ce que veut dire cette parole : « Cherchez avant tout le royaume du ciel » ? Je crois que ce que, au fond, tous les adversaires de l’Église ont contre elle, c’est le manque de sainteté de ses membres, particulièrement des consacrés à Dieu. Leurs objections déclarées ne pèsent pas lourd, en réalité, dans la balance… Gare alors, aux « occupations maudites » (cf. S. Bernard).

Conclusion : Je prie le ciel de m’accorder que les miens veuillent bien penser comme moi sur ce chapitre très important, les miens, et tout le monde aussi.

 

UN POINT IMPORTANT DE MON HUMBLE HISTOIRE PERSONNELLE

D’une façon spéciale, je dois à la Ste Vierge Marie la grâce d’être prêtre. À l’époque de ma première communion, (peut-être), je demandai à Notre-Dame du Très Saint Rosaire, patronne de la Croix-des-Bouquets, ma paroisse, la faveur de terminer mes études… Or mon père étant mort alors que j’avais onze ans, je finis par abandonner le projet de m’instruire davantage après la classe de 4ème secondaire, au Lycée Pétion… Je suis devenu secrétaire d’officier de l’État-Civil, professeur d’école primaire.

D’autre part, j’ai eu l’avantage de lire « l’histoire d’une âme » autobiographie de la Bienheureuse Sœur Thérèse de l’Enfant-Jésus que m’avait passé le père Georges Mingem, vicaire de ma paroisse. Je n’ai pas tardé à désirer de « ne rien refuser au Bon Dieu » moi aussi… Cela devait conduire naturellement à l’idée de la consécration à Dieu. Mais me consacrer à Dieu, moi, fils unique, c’était terrible ! Par surcroit, ma mère était veuve. Cependant j’ai dit mon « fiat ». C’était à un endroit que je n’oublierai jamais.

Alors, il fallait entrer à l’École Apostolique, continuer mes études au Petit Séminaire Collège St. Martial, jusqu’à la philosophie. Un beau jour (étant prêtre, peut-être) je me suis rappelé brusquement ma demande d’enfant à la Vierge de terminer mes études. Cette bonne Mère m’a exaucé de la façon que j’ai dite.

Par ailleurs, la communauté des Petites Sœurs portait le nom de Notre-Dame du Perpétuel Secours, pendant plus de cinq ans. Mais j’ai appris qu’il y avait, née bien plus tard que la nôtre, une communauté fondée au Cap-Haïtien par le Père Maurice Choquet, futur Évêque Auxiliaire, sous le vocable de Notre-Dame du Perpétuel Secours également…

Cependant Monseigneur Rémi Augustin, venu à Marbial pour enquêter sur notre Communauté, a vite conclu que l’œuvre était providentielle. Il a fait chercher pour elle les Constitutions d’une Congrégation Monfortaine Africaine, lesquelles retouchées par lui et moi étaient devenues les toutes premières constitutions de nos Petites Sœurs. Monseigneur était d’avis que nous abandonnions désormais le vocable de Notre-Dame du Perpétuel Secours à la communauté du Cap, plus développée que la nôtre. Nos futures religieuses deviendraient les Petites Sœurs de Ste. Thérèse de l’Enfant-Jésus ; car on était sur la paroisse de cette aimable Sainte. La Sainte Vierge n’en serait pas jalouse, a déclaré Monseigneur.

La main de Dieu était certainement dans tout cela : je suis prêtre de la Vierge, comme je l’ai dit plus haut. Je suis prêtre de Ste. Thérèse, de même. Ma présence à Marbial comme curé de la première paroisse de Ste. Thérèse de l’Enfant-Jésus en Haïti était un miracle de celle-ci (je crois en avoir la preuve). Tout cela évoque chez moi l’idée d’éléments préfabriqués pour une œuvre bien déterminée.

Mais nous voilà d’une part, en face de Marie la petite servante du Seigneur devenue toute jeune, Mère de Jésus, Fils de Dieu, s’abandonnant entièrement à la volonté Divine aimant son Jésus à la folie, se sanctifiant par les petites choses d’une vie toute simple pleine d’ardeur apostolique. Mère de l’Église, âme silencieuse et mortifiée, et d’autre part de la Petite Sainte Thérèse… de l’Enfant-Jésus et sa petite voie d’amour, de confiance et d’abandon, aimant la vie toute simple de la Vierge et son merveilleux Magnificat, désirant convertir toutes les âmes à Dieu et voulant, dans ce but, être mère spirituelle des prêtres, se refusant à agir par nature… J’ai fini par voir que la Petite Sainte est la répétition, le prolongement dans le temps de la Vierge Marie, sauf les prérogatives extraordinaires de Mère de Dieu, apanage incommunicable de Notre Mère du ciel. Oui, Marie et Thérèse ne font qu’une, c’est évident. Nulle contradiction possible entre l’imitation de l’une et de l’autre, mais au contraire, aide mutuelle, renforcement. Notre mission providentielle à nous, qui ne l’avons pas cherchée, c’est de faire ressortir cette réalisation divine pour le plus grand bien de l’Église.

N.B. L’essentiel de la dévotion montfortaine, c’est l’imitation du Fils de Dieu devenu Fils de Marie et par là, profondément sien (donc, par amour de Marie et pour l’honorer, le fidèle tient à se donner aussi à la Vierge de son propre mouvement) de plus c’est la conviction fondée que nos démarches pieuses auront toujours plus de succès si elles passent par Marie.

Conclusion : L’esprit du fondateur est que notre famille religieuse soit à la fois mariale et thérésienne. Prière donc de revenir sous ce rapport aux anciennes constitutions.

Objections : Il ne s’agit ici que d’une simple dévotion. Cela ne peut pas faire partie de l’esprit du fondateur. D’ailleurs est-ce qu’un catholique romain n’est pas marial de plein droit ? Réponse : Il y a les Prêtres du Saint-Sacrement, les Prêtres du Saint-Esprit, les Jésuites… Chacune de ces familles religieuses a providentiellement l’accent sur un point essentiel de notre Religion Chrétienne. Allez donc leur dire qu’ils doivent se contenter d’être comme tout le monde et ne pas se sentir tenus à une dévotion spéciale au Saint-Sacrement, au Saint-Esprit, à Jésus… Voyons donc Dieu dans sa Miséricorde, aime et sème la diversité dans l’unité pour subvenir à notre constant besoin de rompre la monotonie, et voilà !

Tenez ! est-ce qu’il n’y a pas dans l’Église : « La Congrégation du Saint-Esprit et du Saint-Cœur de Marie ». De même, une congrégation peut-être à la fois explicitement mariale et thérésienne…

 

ŒUVRES PROPRES

Mariaux et Thérésiens, nos instituts doivent d’adopter comme œuvres propres : La Légion de Marie, cette excellente formatrice à la Dévotion Mariale (en même temps que sa propagatrice) et puissante entreprise d’apostolat catholique ; La légion des Petites âmes (laquelle peut-être pas tout à fait identique, si l’on veut, à l’œuvre de même nom née en Belgique). Tout comme la Croisade Eucharistique elle peut distribuer des bulletins à noter par les enfants. Ainsi elle forme à l’amour de Dieu et à l’esprit du sacrifice les citoyens et citoyennes de demain, chose de la plus haute importance…

Mais comme haïtien et disciple de leur fondateur, nos Instituts sont, il me semble, « prestiniens » de naissance. Le PRESTEN, c’est l’Association des Promoteurs de l’Éducation Rentable de primordiale importance : « Présé souin Tè-nou ». Elle a pour tâche, non seulement de combattre l’érosion, mais de régénérer le sol national.